samedi 3 septembre 2016

Le Padawan fluvial contre-attaque^^

On ne se méfie jamais assez des jeunes. On devrait pourtant. Je comprends bien qu'il est difficile de prendre au sérieux des êtres vivants plafonnant à moins d'un mètre cinquante de haut sans leurs talonnettes, chassant plus implacablement le Pokémon rare que l'agriculteur esseulé la brebis nymphomane et ne pouvant s'empêcher de faire tout un drame de ne trouver que des Lucas Digne dans leurs vignettes Panini. Mais c'est une lourde erreur. Des études très sérieuses menées par la chambre d'agriculture de Perros-Guirec émettent l'hypothèse que la plupart d'entre-eux risque dans l'avenir de prendre la place des vieux. Je veux bien admettre que cela sent un tantinet l'assertion aventureuse émanant de surcroît de Bretons ruraux dont on peut à raison questionner la tempérance mais qu'importe : ça fait tout de même frémir.
Cela dit, pouvons nous, humbles mortels, nous opposer aux sombres manigances de Chronos avec de raisonnables chances de succès, quitte à grossir les rangs d'une cause servie par quelques énergumènes jusqu'au-boutistes, condamnés par leur aveuglement non seulement à une  existence toute entière vouée à l'échec, mais aussi (voire surtout...) à l'ostentatoire port de vêtements effroyablement ridicules, tout en refusant contre toute logique d'admettre l'inéluctable victoire de l'adversaire ? Il suffit d'observer les membres du Hamas, les militants du MODEM ou les ultras du Stade rennais pour saisir sans équivoque que la réponse est, hélas, contenue dans la question. Le temps ne fait rien à l'affaire. Les jeunes sont l'avenir. Je sais. C'est dur.
Bref... Après tout, contrairement à ce que disent tous les matins mes articulations, je suis encore jeune. Surtout comparé à une tortue de mer, la muraille de Chine ou même Giscard. C'est donc en conscience que j'ai décidé de me rapprocher des futures forces vives de la nation en formant, avant d'être totalement podagre, un apprenti destiné à me succéder dans cette noble activité qu'est la pêche à la ligne. J'assume d'autre part sans faux-semblants la dimension démagogique de la démarche. En effet, si ça pouvait contre toute attente convaincre au moins un pétulant teenager de ne pas me tabasser à mort devant le distributeur de monnaie avec mon propre déambulateur parce que j'ai oublié mon code de carte bleue, ce serait déjà un progrès notable en ce qui concerne le dialogue inter-générationnel...
Mon stagiaire, Isidore Applefish, surnommé Suricato par les recruteurs de Fluminense (à qui n'avait pas échappé sa vigilance à lorgner puis à neutraliser d'une sortie implacable l'éventuel avant-centre animé d'intentions goléadoresques inspirées par les oeuvres complètes de JPP ) n'est pas un jeune comme les autres. Toujours d'humeur joyeuse, quintessence juvénile de l'ataraxie débonnaire, il ne se formalise pas outre mesure des bordées de jurons fort imagés que profère allègrement son Maître Jedi dès qu'il se vautre avec maestria sur une plaque de vase, qu'il réussit majestueusement à accrocher une cuillère tournante en haut d'un arbre ou qu'il ne manque de justesse de prématurément finir sa morne existence de vieux barbon misanthrope mal rasé dans d'atroces souffrances en se faisant ensevelir sous un éboulis de caillasses. Magnanime, ce brave garçon n'accorde donc pas plus que ça d'importance aux pathétiques démonstrations de sénescence accélérée de son supposé supérieur hiérarchique. Non, lui, il pêche... Mieux que le cataclysmique Géronte de la Jungle^^...
Car son Maître Jedi, suant à gouttes continues, tirant la langue à chaque ascension de taupinière et dont la couenne, déjà marbrée par une coupable addiction multi-décennale aux Côtes-du-Rhône, vire au vermillon au fur et à mesure de l'après-midi, a toutes les peines du monde à suivre la cadence. Il lui faudra en effet rassembler toute sa rouerie de mythomane de comptoir, forgée par toute une carrière émaillée de peu glorieux coups tordus à la limite du pénalement répréhensible, pour échapper de justesse à une ignoble bredouille !!!^^
On est donc pas passé loin de la tragédie. D'autant que le Padawan s'est une nouvelle fois signalé pendant son apprentissage du "walking the dog". Grâce à un maniement inédit rompant avec la nage académique en zigzag (baptisé la Danse du Stickbait pris de boisson^^), il a fait monter derrière le leurre la plus grosse perche que j'ai vue depuis des années dans le fleuve. Dommage. On doit hélas désormais lui donner rendez-vous pour l'année prochaine à ce monstre fluviatile. Mais qui sait, on le reverra peut-être plus tôt si les contraintes horaires nous le permettent... Vu que c'est la fin des vacances et qu'on est en train de ranger les pédalos... Bien que, malheureusement, les beaufs en jet-ski soient toujours de sortie... Ainsi que les vifeurs en slip de bain moule-burnes, cette sous-espèce saisonnière typique puisant son inspiration vestimentaire dans la regrettée série Alerte à Malibu, son vocabulaire dans l'autobiographie de Frank Ribéry et son exubérante sociabilité dans le film Délivrance^^...
Ouf, je retrouve, en me comparant à ces flamboyants spécimens,  une certaine dignité. Ne serait-ce que par défaut^^. Il n'y a donc désormais plus qu'à patienter en attendant la fin de la canicule qui me verra de nouveau rallier les fondamentaux stylistiques permettant de se fondre sans anicroche dans un commode anonymat au sein de la masse picaresque des truculents vieux briscards indigènes...

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