jeudi 29 septembre 2016

Retour aux vraies valeurs^^

Alors que j'avais opté pour une interruption temporaire de mes pérégrinations halieutiques sur rochers gluants me poussant toujours plus près de la fracture ouverte, un inopiné changement dans mon emploi du temps m'a permis, Dieu soit loué, de retourner au bord de l'eau... Tout est affaire d'organisation. Se retrouver fortuitement en fin d'après-midi à quelques kilomètres d'un accessible spot  sablo-vaseux (c'est à dire exempt de ces rochers assassins prompts à vous faire obéir à la pesanteur...) après avoir accompli l'ensemble de ses tâches journalières tout en ayant, ô miracle, un combo ML et quelques petits leurres dans la musette, cela dénote des talents de tacticien hors-pair. Ou de pervers ayant élevé la fourberie au rang des Beaux-Arts, c'est selon^^...
Déflorons le suspens : après des semaines difficiles consacrées à la traque du monstre fluvial venu du froid, il était temps, grand temps même, de revenir aux vraies valeurs de la pêche ligérienne d'en bas. Vous savez, cette pêche de l'extrême dont les gens qui pêchent des coins moins pollués ne peuvent pas appréhender la toujours plus triviale réalité, ni même à fortiori apprécier les minimalistes succès vu qu'ils sont eux blasés de prendre du brochet plus que métré, de la truite cyclopéenne ou de l'aspe confinant au Léviathan à chaque lancé ou presque... Bien évidemment, parler de cette pêche typique de mon terroir sinistré revient à en revendiquer publiquement l'exercice de sa quintessence honteuse : le gros carton de pin's qui décontracte... Chevesne, perche et, parfois, brocheton coopératif en sont les récurrentes victimes...
Malheureusement, l'endroit où j'ai décidé de pratiquer mon art a été "aménagé" par la société de pêche locale. Ce qui revient à dire qu'on a viré les arbres dans l'eau pour ne pas que Riton, Dédé & consorts n'y laissent la moitié de leur pension d'invalidité-cirrhose sous forme de flotteurs Autain 15 grammes irrémédiablement accrochés au sommet des marronniers rivulaires... De par le fait, les postes y sont moins évidents... L'accès déjà peu ardu a été de surcroît grandement facilité par un faucardage tout en finesse que n'aurait pas renié le colonel Kilgore... Le résultat est sans appel : la cuillère tournante fait fuir tout le monde dès qu'elle touche l'eau... Ils ont du en voir passer quelques tonnes cet été, les infortunés poiscailles du cru...
Une fois l'impasse de la cuillère tournante actée, ce sont donc mes deux Chubby 38 chinois à un euro et des broutilles^^ qui m'ont rapporté la majorité des prises en me permettant, grâce à leur prix raisonnable, de tenter des lancers au ras des (rares...) obstacles au courant. Pari gagnant pour un crankbait discount. D'autant plus que je n'aurais certainement pas essayé de faire pareil avec le même genre de leurre payé une quinzaine d'euros...
Mais mon bon vieux poisson-nageur polonais en balsa, silencieux et ne payant pas de mine, a fait mieux que résister à la concurrence. Six années de bons & loyaux services. Des centaines de prises et il est toujours là pour damer le pion aux japonaiseries hors de prix...
C'est à en désespérer du somptuaire. Comment vont survivre nos élites de la pêche à la ligne si l'on peut prendre du poisson avec des Z Claw à 5$ et des Chubby à 2$, ma bonne dame ? Ah, quel malheur, c'est la mort du petit commerce^^...
Mais laissons là ces considérations mercantiles !!! La peste soit des apothicaires bedonnants, serviles et à la lippe humide qui ont transformé notre passion d'enfance en signe extérieur de richesse... La pêche à la ligne, c'est un loisir simple, populaire et qui devrait donc rester accessible à tous sans qu'on ait besoin de faire croire à tout un chacun qu'il faut mettre des sommes astronomiques sur le comptoir pour avoir l'insigne honneur de prendre dans une sauce aux PCB deux poissons maillés à l'année ... Alors quand je passe deux bonnes heures, au bon moment, à l'instant T pile-poil de la marée et que les touches s'enchaînent comme à la Foire du Trône, je suis le plus heureux des pinseurs.
J'en avais presque perdu l'habitude de ces sorties à plein de poissons durant lesquelles on ne change de leurre qu'au bout de 10 ou 15 prises et qui contrastent agréablement avec celles, un tantinet plus laborieuses, où on change fébrilement 25 fois de leurres avant qu'une perchette ne vienne avec une immense mansuétude sauver les pitoyables vestiges de notre honneur professionnel !!!^^
Bref, j'ai eu de la chance d'avoir du temps de libre, d'avoir été à la bonne heure au bon endroit et, ce qui était le plus facile, d'avoir embarqués la canne ML et des petits leurres. Du coup, je ne planifie plus rien. Je ne vais pas perdre du temps à machiaveliser du rapala alors qu'il me reste encore trop de sorties prévues à caser dans les prochaines semaines. L'occasion fera le larron. Ou pas...
Sinon, pour conclure par une touche toujours bienvenue de récrimination, j'ai consacré une partie de la sortie à ramasser les merdes laissées par les usagers de la nature. Passons sur les bouteilles de soda nonchalamment abandonnées par le duo de juvéniles vifeurs croisé au début du parcours. Bon sang ne saurait mentir : il y en a  qui font honneur aux traditions familiales. "Tu seras un porc, mon fils"... Je ne vais pas non plus me formaliser outrageusement sur les kilomètres de nylon retrouvés emmêlés à même le sol. On en a tellement l'habitude... Mais il y a certains vestiges qui en disent long sur l'intérêt qu'il y a à lâcher des cons supplémentaires, hypnotisé par leur  écran de portable, dans un environnement naturel déjà en souffrance...
Finalement, malgré une petite parenthèse heureuse dans un quotidien pas toujours jovial, on est toujours rattrapé par ces petits détails qui nous rappellent que nous sommes condamnés par la dimension exiguë de notre misérable petite planète à être à jamais cernés par les cons...


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