jeudi 24 mai 2018

Contre la douille sous l'orage

Il est parfois de bon ton de se remettre en question. De se mettre en danger. De revenir à des pêches sans filet, du bord, sur des secteurs bien racassés et où prendre un poisson relève plus du paranormal que de la banalité halieutique. En vérité, j'essaye tant bien que mal de me justifier. Hélas mes pérégrinations en ces lieux maudits du lunker ont une origine bien plus prosaïque qu'une quelconque quête de renouveau à la limite du mystique lorgnant sur le new age^^... Ce soir, je n'ai pas de voiture. C'est donc à pied que je vais descendre ce parcours jadis sauvage avant des aménagements rivulaires qui ont provoqué un chouette envasement, fait partir les poissons au loin mais où les taquineurs de cruchon indigènes ne décorent plus désormais les cimes des arbres avec leurs flotteurs fluorescents de 40 grammes sur leurs fameux lancés à deux mains appuyés en direction de la rive d'en face... Le progrès, quoi. Inutile de rêver à un tableau digne d'un Tartarin en popeline à stickers. L'objectif ultime, c'est d'éviter la bredouille par n'importe quel moyen. Y compris les légaux.
Planqué dans la verdure, un panneau "alibi"... Secteur no-kill, inaccessible à 90% sur chaque berge... Par contre, en bateau...


Souvenirs, souvenirs... Il y a 20 ans, j'y passais mes hivers à empiler les sandres. Avant Internet, avant les appareils photo numériques... Et avant qu'une revue de pêche nationale ne classe le coin parmi les 10 meilleurs coins à sandres de France. Ce qui avait à l'époque provoqué une ruée assez hallucinante de barcasses surchargées de glacières venues de toute la région chaque week-end de l'automne à la fermeture. Inutile de préciser que les belles pêches de sandres appartiennent dorénavant à un passé en passe de virer au mythique... Bref, après quelques tentatives peu concluantes de prendre un truc aux alentours du pont, je me suis laissé aller à descendre les rives de la rivière et le fil de mes souvenirs... Là, un sandre de 92cm en novembre en pleine crue... Là, une perche de 50cm en décembre, il gelait à pierre fendre... Quand tout à coup, patatras, je me retrouve truffe à truffe avec un connard de clébard hargneux manifestement enthousiaste à l'idée de me déguster un bout de mollet voire plus si affinités...


Bien entendu, le molosse divagateur appartenait à Nordahl & Jonathann, pseudo-carpistes refusant l'impasse de l'intellectualisme, cuvant leur vinasse dans leur tente camouflage assortie à leur costume du meilleur goût mais qui, malgré mes récriminations un tantinet virulentes, n'étaient visiblement pas en état de se lever ni de calmer leur clebs. Sur ce, évidemment, alors que je rebroussais chemin devant les babines retroussées de la Bête du Bredouillistan afin d'éviter une cruelle mutilation, l'orage qui menaçait, éclate... Heureusement, à 300 mètres de là, il y avait un abri disponible pour mon frêle épiderme : le pont que je venais de ratisser en pure perte. Bon, quand faut y aller, faut y aller...
Sans trop de conviction, je me mets donc à pêchouiller à l'abri du déluge en ruminant mes idées canicides quand je vois à deux reprises un petit poisson non identifié venir shooter mon leurre au ras de la berge. Ni une ni deux, je monte alors avec la veulerie qui me caractérise un micro-shad antidouille aliexpress afin de vertement châtier l'impudent. Et là, surprise : je décroche... Une grémille !!! Ah ça faisait longtemps. Du coup, j'insiste (vu que de toute façon, la pluie redouble d'intensité...) et je finis par tomber sur un banc de perches... Youpi, douille sauvée en 4 exemplaires.
Petit à petit, l'orage se calme... L'eau déjà bien marronnasse n'a pas tourné à la Vittel. En surface, sur les zones calmes, c'est un sympathique mélange de feuilles mortes, de pollens et de myriophylles qui transforme les leurres à chaque lancé en sosie du bonhomme Cetelem (pub gratuite... Faut bien payer les produits Ultimate fishing quand on a pas gagné au Loto^^). Bien trempé, je floquefloque (du verbe floquefloquer : marcher dans des fringues et des chaussures mouillées qui font floc-floc, faut tout vous expliquer ou quoi ?^^) un peu plus loin sans trouver grand chose à me mettre sous la canne... A part un petit bass qui daignera honorer un petit leurre souple maison parfumé à la sardine...

Le soleil est déjà bas sur l'horizon quand j'arrive à la DDFG (Digue de la Douille Fatale Grave), haut lieu du viandage journalier au vif de 5 centimètres "attrape-tout" sous flotteur, des Diving Chubby pendouillant dans les arbres au bout d'un fluoro 60/100° (pour éviter les coupes incessantes des brochets qui infestent les environs... Enfin, c'est ce que dit le livret de la fédération de pêche au moins...) et des combos improbables (les descendants du senhor Oliveira Da Ferreira doivent tous bosser dans un rayon pêche chez Décathlon, c'est pas possible autrement^^). Perdu pour perdu, c'est le moment de sortir la nouveauté neuve du jour librement inspirée du Spincher... Excellent début pour ce petit leurre bricolé le jour même : deux bass et une perche décrochés en 10 minutes avant que ne sonne la fatidique et sacro-sainte heure légale... On en reparlera. Mais on le fera ailleurs car faut quand même pas déconner !!!^^
En résumé, j'ai marché quelques kilomètres, pris 5 poissons pour au moins le double décroché et pris une bonne rincée sans compter que les moustiques m'ont littéralement dévoré. Bref, j'ai passé une soirée fort utile. Ne serait-ce que pour me remettre en mémoire les raisons qui me faisaient éviter ce secteur depuis une éternité !!!^^



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